Un bébé de trois mois, de nationalité américaine, a été tué et sept autres personnes blessées, mercredi soir à Jerusalem, par un chauffeur arabe ayant volontairement précipité son véhicule vers une station du tramway, à Ammunition Hill. Une vidéo de surveillance montre la voiture sortir de la route puis rouler sur le quai, heurtant sans braquer les personnes qui y patientaient. Après avoir heurté un poteau, le conducteur a tenté de s’enfuir à pied. Atteint par balles, il est mort quelques heures plus tard à l’hôpital.
L’auteur de cette attaque, qualifiée de « terroriste » par les autorités, qui a eu lieu à quelques centaines de mètres du quartier général de la police israélienne, s’appelle Abed Abdelrahmane Shaloudeh. Il aurait déjà un casier judiciaire rempli pour des actes de « terrorisme », explique le porte-parole de la police, Micky Rosenfeld. Le jeune homme venait de purger une peine de prison de 18 mois. Selon ses proches, interrogés par l’AFP, il était le neveu d’un ancien cadre militaire du Hamas, Muhi al-Din Sharif, tué à Ramallah en Cisjordanie en 1998, dans des circonstances jamais éclaircies.
Abed Abdelrahmane Shaloudeh est originaire du quartier de Silwan, à Jerusalem-Est, juste au sud de l’enceinte de la vieille ville, où se trouve la cité de David. Silwan est l’un des principaux objectifs des colons ultraorthodoxes, qui essaient de s’y implanter, maison après maison, en acquérant les biens pour des sommes conséquentes. Neuf nouvelles familles y ont emménagé cette semaine. Ils sont à présent quelques centaines, vivant au milieu de dizaines de milliers de Palestiniens. Malgré leur faible nombre, cette présence, protégée par les forces de l’ordre et des services de sécurité privés, est ressentie comme une provocation et une violence symbolique par les habitants. Jerusalem-Est, revendiquée comme la capitale de leur futur Etat par les Palestiniens, est occupé par Israël depuis la guerre des Six-Jours.
« INTIFADA MUNICIPALE »
Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, s’est entretenu avec le ministre de la sécurité intérieure, Yitzhak Aharonovich, le chef de la police Yohanan Danino et enfin avec Yoram Cohen, le patron des services de renseignement intérieur, le Shin Beth. La décision a été prise de renforcer les mesures de sécurité à Jérusalem, qui étaient déjà conséquentes, pour mieux faire face à la multiplication des émeutes urbaines depuis le début de l’été. « Aujourd’hui et plus que jamais, il est clair que nous devons envoyer des forces de police dans les quartiers où il y a des troubles, les déployant en nombre et stratégiquement », a plaidé le maire de la ville, Nir Barkat.
Un barrage de police à Jérusalem, mercredi 22 octobre.
Depuis l’enlèvement et l’assassinat de trois adolescents juifs en Cisjordanie en juin, puis celui d’un jeune Palestinien de Jérusalem-Est, brûlé vif début juillet, la tension n’est jamais retombée dans les quartiers arabes du nord et de l’est de la ville. Des centaines de Palestiniens ont été arrêtés, accusés de participation à des émeutes. Le tramway, rare symbole de mixité, est devenu la cible privilégiée des émeutiers. Selon la société qui en assure l’exploitation, neuf trains sur 23 ont été endommagés par des jets de pierre et sont hors d’usage. Plus grave : le 4 août, en pleine opération « Bordure protectrice », dans la bande de Gaza, un Palestinien à bord d’une pelleteuse avait percuté et retourné un bus, tuant une personne et en blessant cinq autres, avant d’être abattu par des policiers. Le quotidien Haaretz évoquait, jeudi, le développement d’une véritable « intifada municipale ». Dans le quotidien, le célèbre journaliste Gideon Levy qualifie Jerusalem de « capitale israélienne de l’apartheid ».
Récemment, les tensions se sont concentrées autour de l’esplanade des Mosquées, où se trouve la mosquée Al-Aqsa, troisième lieu saint de l’islam. Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a appelé il y a quelques jours les Palestiniens à utiliser « tous les moyens » pour le défendre contre les visites de colons juifs, qui provoquent la fureur des croyants. Mercredi, M. Nétanyahou a mis en cause Mahmoud Abbas pour ces propos, incitant à « des attaques contre les Juifs à Jerusalem ». La droite nationaliste israélienne essaie depuis des mois de changer le statu quo qui existe au sujet du mont du Temple et réclame un changement législatif, afin de permettre aux Juifs d’y prier à certaines heures. La décision des autorités de limiter l’entrée dans la mosquée aux musulmans âgés de plus de 50 ans a envenimé l’atmosphère et provoqué des heurts violents avec la police.