C’est une victoire, " la correction d’une erreur historique de l’Union européenne (UE) ", a salué le Hamas. Le Tribunal de l’UE a annulé, mercredi 17 décembre, l’inscription du mouvement palestinien sur la liste européenne des organisations terroristes pour vice de procédure. Une victoire symbolique : le tribunal n’a pas tranché sur le fond et a maintenu le gel des avoirs du mouvement pour trois mois, le temps que le Conseil revoit sa copie. Au sein de l’Union, l’embarras est palpable.
L’UE " considère toujours le Hamas comme une organisation terroriste ", a martelé la Commission européenne, mais il lui faut apporter " les actions correctives appropriées " pour fonder la décision prise par les Etats membres. Le délai imparti est court au vu des failles révélées par la procédure. Les juges ont donné raison au Hamas, qui contestait l’absence de motifs à son maintien sur la liste européenne – où sa branche militaire a été inscrite en 2001 et sa branche politique en 2003 –, lors des réexamens semestriels effectués depuis 2010. " Le dossier est vide. Le Conseil doit trouver des décisions nationales récentes " pour l’étoffer, commente Gilles Despeux, porte-parole de la Cour de justice de l’UE. Or, les Etats européens n’ont pas été en mesure de produire " des preuves ou des indices sérieux et crédibles " pour fonder le caractère terroriste du -Hamas, qui doivent émaner de -décisions d’" autorités compétentes ", notamment policières ou -judiciaires.
" Lors des plaidoiries, le Conseil a dit que les décisions existent mais qu’il n’est pas en mesure de les présenter, indique M. Despeux. Ces décisions semblent ne pas exister ou alors les Etats membres ne les lui ont pas fournies. " Le Conseil a également invoqué des mesures prises par les autorités américaines et britanniques en 2001 – irrecevables pour des actes perpétrés ultérieurement – et des informations de presse et d’Internet. " Le Conseil procède lui-même à ses propres imputations factuelles autonomes sur la base de la presse ou d’Internet ", a conclu le tribunal, jugeant qu’il outrepassait sa compétence.
Un contexte différent
" Le Conseil doit reprendre le dossier à zéro. Il faut une nouvelle décision de politique générale au consensus pour mettre le Hamas sur la liste ", estime le juriste François Dubuisson, qui pointe l’absence de procédures ouvertes à l’encontre des dirigeants du Hamas. Pour le juriste, de nombreuses questions pourraient être soulevées, alors que le contexte a changé depuis 2001 et la seconde Intifada, quand le Hamas revendiquait une politique active d’attentats. " Les tirs de roquette pendant la guerre de Gaza sont-ils considérés comme des actes terroristes ? La responsabilité du Hamas est-elle établie dans des actes terroristes qu’il ne condamne pas ni n’endosse ? "
L’UE épluche scrupuleusement le dossier, sous la pression du gouvernement israélien, qui a fustigé " l’hypocrisie européenne ". Elle cherche à gagner du temps. " Un recours va être déposé " devant la Cour de justice européenne, dit une source diplomatique. La tactique judiciaire, qui permet de suspendre la décision le temps du pourvoi, estimé à deux ans, offrira un délai précieux.